Santé de la reproduction, un faible accès des jeunes ivoiriens aux offres de services  

Article : Santé de la reproduction, un faible accès des jeunes ivoiriens aux offres de services  
Crédit: CCO
8 avril 2024

Santé de la reproduction, un faible accès des jeunes ivoiriens aux offres de services  

Le rideau est tombé sur le Dialogue mondial des jeunes à l’occasion de la célébration au Bénin des 30 ans de la Conférence internationale sur la population et le développement (CIPD). Un évènement majeur auquel a pris part Julienne Gbato, ivoirienne, défenseuse des Droits en santé sexuelle reproductive (Dssr) des adolescents et jeunes. Elle livre son sentiment et fait un bref état des lieux des DSSR en Côte d’Ivoire.

Les travaux du Premier Dialogue Mondial de la Jeunesse se sont achevés le vendredi 05 avril 2024 après deux journées d’échanges à Cotonou,  autour de la « La vision de la nouvelle génération sur la population et le développement » qui a permis à plus 1.000 jeunes venus de plus de 130 pays du monde d’exprimer leur vision sur la population et le développement, et de faire des recommandations pour un monde plus juste et plus équilibré où les besoins des jeunes sont davantage pris en compte par les décideurs mondiaux.

Au nombre de ces jeunes, Julienne Woueuga GBATO, Présidente Nationale du Mouvement d’Action des Jeunes (MAJ) affilié à l’Association Ivoirienne pour le Bien-Etre Familial (AIBEF). Informaticienne de formation, elle est une fervente défenseuse des Droits en santé sexuelle reproductive des adolescent.e.s et jeunes depuis l’âge de 11 ans et actuelle Chargée de Programme dans une ONG locale en Côte d’Ivoire.

Bonjour Julienne. Vous avez pris part au Dialogue Mondial de la Jeunesse, organisé à l’occasion des 30 ans de la Conférence Internationale sur la Population et le Développement, à Cotonou, au Bénin, les 4 et 5 avril 2024. Quel sentiment vous anime à l’issue de ce rendez-vous important pour l’avenir ?

A Cotonou j’ai eu l’honneur de porter la voie des jeunes ivoiriens, défenseurs et défenseuse des Droits en santé sexuelle reproductive des adolescents et jeunes à travers deux sujets de discussions. Une première intervention en tant que panéliste sur le thème « Mon corps, ma vie : Santé et droits sexuels et reproductifs et bien-être » et une seconde fois pour faire des recommandations à travers le thème « Résister à l’agenda anti-droits et anti-genre : Plaidoyer et mobilisation des jeunes ».

C’est donc un sentiment de joie et de fierté de voir que nos efforts pour la participation aux prises de décisions les concernant sont aujourd’hui entendus. Parce que pour nous, ce dialogue était inclusif.

Quels sont les sujets essentiels pour la jeunesse dont vous avez discuté au cours de ce dialogue mondial ?

Les sujets essentiels abordés au cours de ce grand rendez-vous sur la Population étaient l’éducation sexuelle complète (ESC), le genre, la paix, la santé sexuelle reproductive, et l’environnement.

Julienne Gbato lors de son intervention au Dialogue Mondial de la Jeunesse à Cotonou _ CCO

A propos de l’accès à une éducation sexuelle complète et inclusive, quel état des lieux faites-vous de la situation en Côte d’Ivoire ?

Nous sommes heureux de voir que la Côte d’Ivoire à fait d’énormes progrès en matière d’éducation sexuelle complète, dans la mesure où elle est intégrée au curricula de formation et est enseignée de l’école primaire au lycée. Aussi nous avons deux (02) guides de facilitation un pour le milieu scolaire et l’autre pour les personnes déscolarisées ainsi que personnes non scolarisées.

Cependant en dépit de ces avancées positives, il reste encore d’énormes défis à relever. Notamment l’effectivité de la gratuité dans les Services de Santé Scolaire et Universitaire – Santé Adolescent et Jeunes (SSSUSAJ), l’absence de communication adaptée en fonction de la cible et de la géographie….

Comment cette situation que vous décrivez impacte-t-elle la santé mentale et le bien-être des jeunes ivoiriens ?

L’Etat ivoirien a pris des plusieurs décisions en faveur Dssr des jeunes que nous nous efforçons de diffuser largement dans les communautés des adolescent.e.s et jeunes. Sauf que les dispositions pour faciliter l’accès à ces offres de services sont faibles, voire inexistantes. Au point les jeunes en arrivent se poser la question de savoir l’utilité de l’information que nous leur apportons si les offres ne sont pas disponibles. Et cela empiète sur le bien être dans la mesure où ils ne jouissent pas pleinement de leur droit.

Quelles sont ces dispositions et d’où vient le blocage de l’accès des jeunes aux services de santé sexuelle et reproductive en Côte d’Ivoire ?

Plus concrètement et à titre d’illustrations, les services de santé sexuelle reproductive sont officiellement gratuits en Côte d’Ivoire pour les adolescents et jeunes de 15 à 24ans, sans distinction aucune. Qu’ils soient scolarisés ou non. Mais malheureusement ces services ne sont pas disponibles à cause du manque d’intrants et du professionnalisme de certains agents de ces structures.

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Quelles sont les recommandations essentielles formulées à Cotonou pour une avancées significatives des Droits sexuels et de la santé reproductive des adolescent.e.s et des jeunes en Côte d’Ivoire ?

Les recommandations formulées par les jeunes à l’issue de ce Dialogue Mondial sont multiples et multiformes, et surtout concernent l’ensemble des thématiques abordées lors de ce CIPD30. Ce sont entre autres :

•      Assurer l’éducation gratuite à tous les jeunes adolescents ;

•  Accroître la participation des jeunes dans les espaces de prise de décision ;

•      Transformer les systèmes éducatifs pour s’attaquer aux inégalités des genres ;

•      Mettre en place des fonds et micro-prêts pour autonomiser les jeunes ;

•      Prendre des mesures décisives pour lutter contre les changements climatiques et les migrations ;

•      Dépolitiser la question des migrations ;

•      Voter des lois qui ne nous privent pas de nos droits ;

•      Éliminez la criminalisation de la grossesse ;

•      Protégez les droits humains pour toute la jeunesse ;

•      Prendre des mesures plus fortes pour éviter des interférences sur les droits humains et l’égalité des genres ;

•      Favoriser des politiques qui promeuvent la justice…

Nous espérons qu’elles aboutiront à des de réformes concrètes au profit des jeunes et des populations de Côte d’Ivoire, de l’Afrique de l’Ouest et du Centre, ou partout dans le monde. Je vous remercie !

Il faut rappeler que la Côte d’Ivoire a enregistré plus de 3 580 cas de grossesse en milieu scolaire, sur la période allant de septembre 2022 à avril 2023, selon le rapport 2023 du Conseil national des Droits de l’Homme. Le Taux de Prévalence Contraceptive des femmes en âge de procréer, en passant de 25,5% en 2022. 

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Au niveau des jeunes et les adolescentes d’Afrique de l’Ouest et centrale, seules 14,7 % des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans mariées ou en union, ou leur partenaire sexuel, utilisent actuellement au moins un moyen de contraception, la région présente la proportion la plus élevée d’adolescentes donnant naissance avant l’âge de 18 ans (33 %). Selon une étude de Sex Rights Africa Network, un accès des adolescentes aux moyens de contraception permettrait d’éviter 2.7 millions de grossesses non consenties par an en Afrique subsaharienne.

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